Depuis plusieurs années, je constate qu’à chaque crise, on crie haut et fort à la baisse du pouvoir d’achat de l’ensemble de la population, sans jamais toutefois la mesurer. Il est fort probable que cette baisse du pouvoir d’achat soit réelle mais est-ce vraiment le cas pour tout le monde ?

En 2008, j’avais mesuré cette perte du pouvoir d’achat dans la population. Autant, elle se vérifiait pour les personnes les plus précaires, autant elle ne se vérifiait pas du tout pour la « population moyenne ». En 2008, nous étions en pleine crise financière et j’ai le souvenir d’un ministre fédéral affirmant que « la fin de mois devient difficile pour tout le monde », ce qui était une façon de dire qu’il fallait autant aider les plus pauvres que les plus riches. Je n’ai évidemment pas à me prononcer sur l’opportunité d’aider les plus riches ou non car c’est une option politique, mais j’estime qu’il est, par contre, indispensable de vérifier la réalité de la motivation utilisée pour ce faire. Est-ce que, réellement, tout le monde voit son pouvoir d’achat se réduire face à la crise ? Cette étude est animée par un doute sur ce sujet et il convient de vérifier l’affirmation.

Il m’a en tout cas semblé intéressant, 12 ans après ma première étude, en pleine crise sanitaire cette fois, alors que l’on entend à nouveau dire, ci et là, que la baisse du pouvoir d’achat toucherait tout le monde, de le vérifier et d’en mesurer le degré.
Par ailleurs, quelle que soit la réalité de l’affirmation, il faut avoir en tête les réelles conséquences de la baisse d’un pouvoir d’achat dans la population. En effet, si une personne, financièrement aisée, perd une partie de son pouvoir d’achat (ce qui reste encore à vérifier dans cette étude), peut-être sera-t-elle contrainte à limiter son train de vie mais, quoi qu’il en soit, ce dernier restera fort élevé et sans conséquences dramatiques sur les conditions fondamentales de vie. Il n’en va évidemment pas de même pour la personne qui est déjà dans la survie. Pour cette dernière, si le pouvoir d’achat régresse (même si c’est relativement peu), c’est la vie elle-même qui risque bien d’être en danger. On peut en conclure que l’on ne parle pas véritablement des mêmes choses dans l’un et l’autre cas. Les mots « pouvoir d’achat » font partie de ces mots que l’on utilise beaucoup pour décrire bien des réalités fort différentes. Il faut donc replacer les mots dans un contexte qui permet d’en apprécier la pleine mesure.

J’aurais donc à cœur de mettre le pouvoir d’achat en parallèle du coût de la vie et du niveau de la vie. Il s’agit de mots différents qui évoquent des réalités différentes.
À plusieurs reprises, je ferais référence à mon étude de 2008. Toutefois, nul besoin de revenir à ce texte pour bien comprendre celui-ci.

 


Pour citer cet article : Ricardo Cherenti, « Mesure d’un « index » pauvreté - Analyse de la consommation des ménages pauvres en Wallonie », Éconosphères, novembre 2021.