Cette Brève de l’Institut pour un Développement Durable vise à faire le point sur ce qu’il est convenu d’appeler le handicap salarial par rapport à nos 3 principaux concurrents commerciaux, handicap estimé par la FEB à 16% pour 2023.

Que tirer de l’analyse ?

Certainement pas que la hauteur des coûts salariaux n’aurait aucun impact économique, en particulier sur la compétitivité/attractivité d’une petite économie ouverte comme l’est la Belgique.

Mais certainement que le handicap salarial calculé classiquement est un indicateur trop grossier, parce qu’il ne tient pas compte de hétérogénéité du tissu productif, ni des subsides à l’emploi (qui ont en Belgique pris une importance relative et absolue croissante), ni de l’avantage de productivité, tendanciellement croissant depuis 2002 (voir graphique ci-après) ; il ne tient pas compte non plus de ce qu’une partie du handicap salarial peut s’expliquer par des structures productives différentes (effet de composition).

Mais certainement aussi que l’analyse doit être poursuivie pour ouvrir la boîte noire des gains de productifs relatifs de l’économie marchande belge : le handicap salarial pousse-t-il à rationaliser plus (avec ce que cela implique sur la distribution de la valeur ajoutée) ?
Mais certainement encore que le handicap salarial n’a pas empêché l’économie marchande belge de gagner des parts dans le total de la valeur ajoutée et le total des heures du travail du bloc Belgique, Allemagne, France et Pays-Bas (voir graphique ci-après).

Tout ceci peut bien sûr alimenter la discussion sur la norme salariale, sur quatre points au moins :
• les différences sectorielles
• la prise en compte ou non des subsides à l’emploi
• la prise en compte ou non des gains de productivité relatifs
• la diversité des moteurs de l’évolution des coûts salariaux ; en particulier, en Belgique, la croissance de la part de la rémunération globale sans indexation (explicite) ou avec des mécanismes d’indexation spécifiques.

Cette fixation sur des indicateurs salariaux, a fortiori s’ils sont rudimentaires, est-elle encore justifiée ? Non que les salaires n’aient pas leur importance ; mais l’accès à des énergies à des prix compétitifs, les pénuries de certains profils, la présence sur des marchés porteurs (énergies renouvelables, économie circulaire, numérisation, IA, biotechnologies, nouveaux matériaux, etc., etc.) et l’adéquation technologique et économique des biens et services aux évolutions de la demande jouent un rôle croissant dans l’adaptation de notre économie à un monde en pleine mutation. Si ce n’était pas le cas on se demande comment feraient des pays comme la Suisse et le Danemark aux coûts salariaux bien plus élevés.

Plus dans la note ici.


Pour citer cet article, Defeyt, P, « Un handicap salarial à relativiser », Brève de l’IDD n°54, 5 janvier 2023.