Les opérateurs associatifs, formant l’essentiel du dispositif bruxellois d’insertion socioprofessionnelle (ISP), sont tributaires des subsides. Cette dépendance financière combinée à l’intensification des politiques d’activation des chômeurs remet en cause les fondements du travail social. Sa dimension qualitative d’aide aux demandeurs d’emploi tend à se réduire au profit d’une action quantitative où la remise à l’emploi précaire devient la seule perspective envisageable. Analyse...

Présentation globale de l’insertion socioprofessionnelle à Bruxelles

L’insertion socioprofessionnelle des demandeurs d’emploi relève officiellement de l’action de différentes institutions publiques (Actiris, Bruxelles-Formation et l’ONEm), d’opérateurs privés marchands (sociétés intérimaires) et non marchands (asbl ou services communaux). Il y aurait entre toutes ces structures une forme de répartition et un partage des rôles, des tâches, des publics et des zones d’actions. Présenté ainsi, le dispositif ISP bruxellois pourrait donner l’illusion d’un tout où règne la complémentarité et où chaque opérateur occuperait une place bien définie que personne ne viendrait lui disputer. La réalité est beaucoup plus compliquée qu’il n’y paraît.

Les structures sont tributaires de contingences qui ne sont pas toutes identiques. Elles n’ont pas toutes les mêmes missions, leurs champs d’activité dépassent bien souvent celui de l’insertion socioprofessionnelle (beaucoup sont présents dans le secteur de l’éducation permanente), leur histoire respective ainsi que leur positionnement idéologique contribuent, dans une certaine mesure, à façonner leurs pratiques.

Nous avons en tout premier lieu les organismes publics tels que l’ONEm (qui relève du gouvernement fédéral) et Actiris (organisme qui relève de la Région de Bruxelles-Capitale). Il s’agit d’institutions publiques dont les missions sont arrêtées par les gouvernements et les élus du pays ou de la Région.

Ensuite, il y a les opérateurs associatifs qui forment l’essentiel du dispositif bruxellois d’insertion socioprofessionnelle. L’existence de ces opérateurs et leurs missions sont par nature plus fragiles que celle des institutions publiques. Ces dernières font partie intégrante de l’appareil d’État. Par contre, les associations, fortement dépendantes des subsides, se trouvent bien souvent en situation de vulnérabilité face aux pouvoirs subsidiants ou de tutelle. Certains services des CPAS comptent également parmi les opérateurs d’insertion socioprofessionnelle.

Enfin, nous comptons dans ledit dispositif la présence de sociétés d’intérim. Cette présence donne lieu à des partenariats entre ces sociétés issues du secteur marchand et des opérateurs associatifs. C’est l’adoption de l’ordonnance sur la gestion mixte du marché de l’emploi qui a rendu possible l’entrée de l’intérim dans le dispositif ISP en Région de Bruxelles-Capitale.

Actiris : appels à projet, évaluation et concurrence

Actiris s’est vu confier par le gouvernement régional le rôle de « régisseur-assemblier », c’est-à-dire qu’il occupe, dans le dispositif bruxellois de placement des demandeurs d’emploi, une position centrale censée lui permettre de rendre le dispositif encore plus efficace. Il appartient à cet organisme de veiller à la cohérence du dispositif bruxellois en matière d’insertion socioprofessionnelle, à son efficience, à la qualité des interventions des partenaires et à s’assurer que les fonds qui transitent par lui, destinés aux partenaires, soient attribués aux plus performants d’entre eux… Actiris pourra donc procéder, pour nombre de conventions, à des appels à projet et il lui appartiendra d’évaluer ensuite le travail effectué sur le terrain. Cela se fera sur base d’indicateurs de performance, au risque, pour le partenaire, de voir sa convention non renouvelée après 3 ans.

Dans un document de 2007 intitulé « Cadre de réforme du partenariat », ACTIRIS propose d’évaluer annuellement l’action des partenaires sur base d’indicateurs de performance qualitatifs et quantitatifs. Pour les projets qui ont une durée de 3 ans, l’évaluation proposée se déroulera de la façon suivante : « Après un an : si objectifs non atteints, faire le point avec le partenaire, chercher des solutions et faire des recommandations. Après deux ans : si objectifs non atteints, un avertissement est délivré au partenaire concerné. Au cours de la troisième année, nouvel appel à projet : l’opérateur qui n’a pas atteint les objectifs fixés ne sera pas pris en compte, sauf s’il démontre des modifications substantielles méthodologiques, techniques, de compétence… dans la prise en charge du public. » [1]
Comme on le voit, l’organisme régional entend piloter l’ensemble du dispositif pour mieux rencontrer les besoins du marché. Les opérateurs en quête de ressources devront satisfaire aux exigences d’Actiris et intégrer sa vision des choses s’ils entendent bénéficier des fonds qui transitent par lui.

Actiris estime par ailleurs qu’il lui appartient de garantir « la qualité et la cohérence des activités d’emploi réalisées par ses partenaires ». C’est donc logiquement qu’Actiris ambitionne de valider les méthodologies « proposées par les partenaires » ou même d’amener ceux-ci à « appliquer les mêmes normes » que celles en application dans « ses propres services » [2].

Lorsqu’ils répondent aux appels à projet, les opérateurs se doivent d’être « complets et précis » dans la « description des méthodologies et outils utilisés ». En cours de réalisation du projet, les services d’Actiris chargés du partenariat et de la méthodologie sont en « liens constants » [3]. Il s’agit au final pour Actiris d’évaluer, d’améliorer, de valider les méthodologies et de les intégrer dans ses appels à projet. Vu sous cet angle, nous pourrions penser qu’il s’agit d’une démarche louable. Des partenaires échangeraient entre eux sur leurs méthodologies respectives en vue d’arriver ensemble à définir et à échanger les bonnes pratiques. Cependant, il faut savoir que l’essentiel des partenaires d’Actiris sont des associations et des organismes publics (CPAS essentiellement). Ceux-là mettront à nu leurs pratiques et leurs modes opératoires pour qu’ensuite ceux-ci soient validés par Actiris qui les intégrera dans ses futurs appels à projet. Appels auxquels pourront répondre des organismes privés marchands soucieux de faire de l’argent avec des fonds publics. Nous pourrions être amenés à penser que nous avons à faire à une forme de pillage du savoir-faire associatif.

Les dirigeants d’Actiris pensent que la mise en concurrence entre les opérateurs sera en tout point bénéfique pour améliorer le dispositif. Et, pour intensifier la rivalité entre opérateurs, Actiris demandait en 2007 que le secteur associatif d’insertion socioprofessionnelle soit mis en concurrence avec le secteur privé marchand [4]. Et de souligner le fait de compter, en 2008, une agence d’intérim parmi les partenaires retenus lors du premier appel à projet relatif à « l’Action de Recherche Active d’Emploi » [5].

L’argument budgétaire pour faire parler et pour faire taire

Le secteur associatif se soumet bon gré mal gré à ces incursions d’Actiris dans son travail. On lui répète à l’envi qu’il vit avec des deniers publics et qu’il doit rendre compte, à l’euro prêt, de leur utilisation. Certains employeurs du secteur eux-mêmes utilisent ce registre langagier pour justifier, à tort ou à raison, nombre de leurs décisions auprès de leurs salariés. L’argument budgétaire est une arme qui sert à discipliner les travailleurs et les employeurs du non marchand.

Avec cette volonté des pouvoirs subsidiants à vouloir tout contrôler et à avoir la transparence totale des activités et des dépenses, la charge de travail administratif n’a cessé d’augmenter ces dernières années au sein des associations. En décembre dernier, la FEBISP (Fédération des entreprises bruxelloises d’insertion socioprofessionnelle) a appelé ses membres à manifester dans la rue avec leurs salariés et leurs publics pour que cesse cette inflation du travail administratif et comptable.

Cependant, ni la FEBISP, ni les opérateurs ISP n’ont manifesté dans la rue pour dénoncer les politiques d’activation mises en œuvre par Actiris et l’ONEm, alors que celles-ci contribuent à la dégradation des conditions de travail du secteur et des conditions d’existence des demandeurs d’emploi. Les Missions locales notamment ont vu leur public augmenter considérablement du fait des convocations de l’ONEm et d’Actiris adressées aux demandeurs d’emploi. A ces occasions, nombre d’entre eux ont été orientés vers les 9 Missions locales que compte la région bruxelloise. Devant ces politiques, les opérateurs ISP, Missions locales en tête, ont principalement réclamé des moyens financiers et humains supplémentaires pour assurer l’accompagnement de tous ces demandeurs d’emploi. Les syndicats, de leur côté, revendiquaient également plus de moyens pour l’accompagnement. Mais de quel accompagnement parle-t-on ?

L’accompagnement des demandeurs d’emploi vers l’emploi précaire

Aujourd’hui, l’accompagnement des demandeurs d’emploi vise avant tout à augmenter leur employabilité, à leur apprendre à se vendre et à chercher du travail ou une formation, sous peine de sanction. L’opérateur de terrain doit chercher à positionner au mieux son public (ou ses publics) sur le marché de l’emploi. Il est incité à saisir toutes les opportunités qui s’offrent à lui. Cela peut passer par des emplois de piètre qualité (courte durée, bas revenus, sous-statut…) dont les salaires sont en bonne partie pris en charge par la collectivité. C’est ainsi que l’employeur, en plus d’être exonéré d’une partie des cotisations sociales, n’aura pas à payer l’intégralité du salaire de son salarié. Les opérateurs ne peuvent en réalité faire abstraction de ces offres d’emploi. Tout d’abord parce que les demandeurs d’emploi eux-mêmes ne s’inquiètent pas de savoir d’où provient l’argent de leur salaire. L’important pour ces derniers, c’est avant tout de tirer un revenu du travail. Ensuite, parce que ces emplois aidés sont les seuls auxquels ils ont accès. Enfin, parce que l’efficacité des opérateurs ISP est évaluée entre autres sur leur taux de remise à l’emploi. Tout concourt à ce que l’offre d’emplois précaires rencontre la demande correspondante. En fait, il semble que ces emplois activés soient tellement attractifs pour les employeurs qu’ils finissent de plus en plus par prendre la place d’emplois réguliers.

Nombre d’employeurs ne s’intéressent plus tant aux qualifications des demandeurs d’emploi qu’au fait qu’ils entrent dans telle ou telle catégorie donnant lieu à des exonérations de cotisations sociales et à une prise en charge par l’ONEm d’une bonne partie de leur salaire. Comme le dit Laurent Cordonnier : « les patrons (…) ont été drogués au chômage, au fait de pouvoir trouver dans la file ce que l’on voulait, au prix où on voulait et dès que des tensions normales se sont manifestées sur le marché du travail », celles-ci « ont été interprétées par le patronat bien entendu, mais aussi par des gens bienveillants à gauche, comme un mal (…), ce qui est complètement délirant ! » [6] Et d’ajouter que ces tensions devraient s’apaiser si on laissait le temps aux patrons d’ajuster leurs offres, c’est-à-dire de rendre attractifs les emplois qu’ils proposent, notamment sur le plan salarial. A l’offre de formations de s’adapter si nécessaire aux besoins du secteur. A l’heure actuelle, plutôt que d’inciter les patrons à augmenter les salaires pour rendre attractif les emplois qu’ils proposent (ceux qui exigent peu de qualification), c’est la collectivité qui verse à la place de l’employeur une partie importante du salaire de base. Les chômeurs, de leur côté, sont invités (sous peine de sanction) à ne pas se montrer trop regardants sur la nature et la qualité de l’emploi proposé.

La multiplication de ces emplois contribue à mettre à mal la sécurité sociale et à compliquer l’existence des personnes en situation de précarité. De fait, leur revenu provient de sources différentes, ce qui engendre bien souvent des difficultés. Les services d’Actiris et de l’ONEm se contentent de faire leur travail. Les premiers font se rencontrer l’offre et la demande et les seconds se contentent de verser la partie de l’allocation au travailleur (activé) sur base des documents qu’il appartient à l’employeur de remplir. Si des problèmes surgissent entre ce dernier et son salarié, ni les services de l’ONEm, ni ceux des organismes de placement n’interviennent. Cela relève de la compétence des syndicats et des tribunaux. Les abus des employeurs sont difficiles à combattre en raison notamment de la nature et de la durée des contrats, de la place du salarié dans l’entreprise, de la présence ou non d’une délégation syndicale, etc. Ces travailleurs s’abstiennent souvent de revendiquer le respect de leurs droits de peur de perdre leur emploi et, le cas échéant, leur droit aux allocations de chômage. Ceux qui se présentent devant les services juridiques de leur syndicat ne disposent que de peu d’éléments matériels prouvant leurs dires. Le plus souvent, ils n’ont pas le réflexe d’accumuler les preuves. Devant ces situations, les syndicats sont souvent démunis et, si les sommes d’argent éventuelles à récupérer auprès de l’employeur sont importantes du point de vue du salariés, elles sont insuffisantes pour justifier la mobilisation de moyens financiers et humains relativement importants dans un procès à l’issue très incertaine. Combien sont-ils, ces travailleurs qui finissent par renoncer à faire valoir leurs droits ?

Le dispositif ISP, tel que pensé dans le cadre de l’État social actif, ne vise pas à lutter contre le chômage de masse qui sévit dans notre région. Les opérateurs s’efforcent d’améliorer « l’employabilité » des publics qu’ils reçoivent afin de mieux les positionner sur le marché de l’emploi. Ce faisant, ils ne font, dans le contexte d’activation actuel, qu’accroître la compétition entre chômeurs dans leur course à l’emploi. La compétition devient d’ailleurs encore plus dure lorsque l’activation s’étend aux non chômeurs, comme c’est le cas, par exemple, pour les usagers de CPAS et les étudiants. Ces derniers se sont vus offrir la possibilité de travailler 46 jours par an au lieu de 23 sous le statut d’étudiant. Ainsi, ils participent à la raréfaction du nombre d’emplois disponibles pour les chômeurs. L’engagement de travailleurs sous statut d’étudiant permet à l’employeur de bénéficier d’exonérations fiscales et sociales substantielles.

Des travailleurs ISP sauvent leur job

Si l’on se penche sur l’appel à projet que lance Actiris pour les ARAE (atelier de recherche active d’emploi), nous pouvons constater que l’une des questions auxquelles sont soumis les opérateurs induit un sens et un but à leur action, sens et but qui contreviennent à l’esprit du travail social. On leur demande de répondre à la question : « En quoi votre service répond-il aux besoins du marché du travail ? » Pour nombre de travailleurs employés dans le secteur associatif, il s’agit avant tout de mettre leurs compétences au service des demandeurs d’emploi et non de répondre aux besoins du marché. Il est vrai que les associations sont libres de répondre ou de ne pas répondre à l’appel à projet mais, lorsque vous exercez dans une commune désargentée, avec un taux de chômage élevé, vous n’allez pas priver ces populations d’un service et de moyens supplémentaires. Dans ces conditions, les opérateurs sont très peu regardants sur les implications (en termes de sens de l’action) contenues dans les questions posées dans le cadre des appels à projet. Par ailleurs, ces derniers contiennent des objectifs chiffrés à atteindre au risque, pour l’opérateur qui n’y parvient pas, de se voir rappelé à l’ordre, voire même de ne plus pouvoir repostuler lors du prochain lancement de l’appel à projet.

A peu de chose près, les opérateurs qui ont répondu en 2008 à l’appel à projet ARAE d’Actiris proposaient déjà ce service aux demandeurs d’emploi. En soumettant ces activités à appel à projet, Actiris a placé ces opérateurs dans la crainte de ne pas voir leur candidature retenue. En conséquence, certains d’entre eux ont délivré aux salariés concernés (dont le financement du poste était lié à l’activité) des préavis de licenciement à la bonne date de façon à ce que leurs salaires soient couverts jusqu’à la fin du préavis par les pouvoirs subsidiants. Par ailleurs, ces travailleurs, menacés de perdre leur emploi, se sont vus confier naturellement la tâche de répondre eux-mêmes à l’appel à projet et de se vendre. Il leur appartenait de sauver leur job. Alors qu’ils répondaient à l’appel, sous la menace d’un préavis de licenciement, les autres services de ces opérateurs continuaient à fonctionner normalement, sans susciter trop d’émoi. Et si, au final, leur candidature n’était pas retenue, les directions ne pouvaient être tenues pour responsables de leur licenciement. Aux yeux de leur conseil d’administration, elles auront fait preuve d’esprit de responsabilité en délivrant les préavis en temps et en heure afin de ne pas faire courir le risque à l’asbl de devoir supporter, sur fonds propres, les salaires des travailleurs dont le poste de travail avait disparu. Les préavis étaient annulés si les candidatures étaient retenues.

En général, tout licenciement pose question et donne parfois lieu à des contestations. Devant de telles situations, l’équipe syndicale est fortement démunie. Plus Actiris procédera à des appels à projet, plus les licenciements se banaliseront au point de ne plus susciter le moindre questionnement. Et les travailleurs en poste chargés de répondre aux appels pour sauver leur job s’apparenteront pour un temps à des VRP [7].

Dans une certaine mesure, c’est l’ensemble des opérateurs ISP qui risquent de se retrouver sous le contrôle étroit d’Actiris. En cours de réalisation, les projets qu’ils porteront en leur sein seront fragiles par nature, car soumis à un devoir de résultat dont les critères d’appréciation auront été définis essentiellement par Actiris. Les emplois du secteur, même s’ils prennent la forme de CDI, seront aussi précarisés, en raison du recours aux appels à projet. Les pratiques professionnelles seront de plus en plus modélisées, ce qui peut s’apparenter à une forme de mise sous contrôle et de neutralisation des travailleurs sociaux. Les chômeurs seront classifiés suivant leur degré d’employabilité, c’est-à-dire suivant leur degré d’éloignement du marché de l’emploi. Sur cette base, ceux qui manquent d’autonomie ou qui ont besoin d’une aide seront orientés vers les opérateurs disposant de ‘‘méthodologies appropriées’’ à leur profil et validées par Actiris. Ces opérateurs seront tenus d’améliorer leur employabilité et de les rapprocher du marché de l’emploi. Les chômeurs devront, quant à eux, se montrer prêts à collaborer avec ces opérateurs et ne pas se montrer trop réticents quant aux emplois qui leur sont proposés.

Les travailleurs sociaux et les responsables associatifs doivent revendiquer une politique de l’emploi qui se donne pour objectif de lutter contre le chômage et pour l’emploi de qualité. Cela doit pouvoir se faire sans que s’accroisse la concurrence entre travailleurs (avec et sans emploi). Les emplois subventionnés dans le cadre de politiques d’activation doivent faire l’objet d’une remise en cause profonde, dans la mesure où ils participent grandement à la fragilisation du monde du travail dans son ensemble, où ils n’apportent aucune réponse à l’insécurité sociale et où ils font prendre de mauvaises habitudes aux patrons.

Le sociologue Robert Castel [8] souligne que l’aide que les travailleurs sociaux apportent aux « individus en difficulté » ne peut pas se faire « dans le cadre d’une logique commerciale d’échange se mesurant au culte du résultat (…). Tu as besoin d’être aidé, mais que me donnes-tu en retour ? Cette idée de la contrepartie s’inscrit, de fait, dans une logique marchande plutôt que dans une logique de droit. (…) Si cette référence au droit était abandonnée, nous entrerions dans cette logique de marché, à laquelle une place de plus en plus grande est actuellement réservée. Alors, ce serait le risque d’abandonner ce qui a constitué le travail social au sens noble du terme ».

P.-S.

Source originale : Hugues Esteveny, L’ISP à Bruxelles : répondre aux besoins des chômeurs ou aux exigences des employeurs ?, Ensemble ! n°71, juin 2011
http://www.asbl-csce.be/journal/JourColl71.pdf

Notes

[1Office régional bruxellois de l’emploi « Cadre de réforme du partenariat entre l’Orbem et les opérateurs d’emploi en Région de Bruxelles-Capitale », avril 2007, Date doc : 13.04.07, page 117

[2Ibid. p. 88 et 89

[3Ibid. p.89

[4Ibid. p. 163

[5Actiris, « Plan d’action stratégique relatif au partenariat d’Actiris 2009 – 1010 » département Partenariat et Réseaux, page 85

[6Laurent Cordonnier, interviewé par Pascale Fourrier dans l’émission ‘‘Des Sous …et des Hommes’’ du 23 avril 2002 sur ALIGRE FM. Auteur du livre « Pas de pitié pour les gueux », publié aux éditions Raisons d’agir.

[7VRP est une catégorie professionnelle (française) qui signifie Voyageur-Représentant-Placier. Dans cette catégorie se retrouvent les salariés qui sont chargés de vendre à une clientèle un service ou un bien.

[8Robert Castel, « Garder la référence au droit », interviewé par Marianne Langlet et Joël Plantet pour la revue « Lien social » n° 1000 -1001 du 13 janvier 2011. Numéro consacré intégralement au sujet : « Le travail social aujourd’hui, comment résister ? »