Nouvelle gouvernance économique européenne- De l’engagement à la contrainte.

Entre le Traité de Rome (1957) et l’Acte Unique européen (1986), la construction de l’Union européenne est allée de l’avant par petites touches. Une conjonction d’éléments va favoriser l’accélération et le développement de l’Union dans un sens très particulier :

- Le décès de De Gaule a levé le veto français à l’entrée de la Grande-Bretagne dans l’Union européenne (1973) celle-ci est dirigée par Margaret Thatcher et les économistes du parti conservateur, entièrement acquis à l’idéologie économique de l’école de Chicago. Les maîtres-à-penser de ce courant sont les économistes néolibéraux Milton Friedman et Friedrich Von Hayek. Au Chili, leurs disciples expérimenteront leurs recettes en réduisant à néant les conquêtes sociales et économiques apportées par le gouvernement Allende, en conseillant la dictature de Pinochet sur les privatisations du secteur public et la libéralisation du marché privé.

- C’est sous la présidence britannique de l’Europe en 1981 que sera présenté le projet d’« Acte européen » visant à améliorer les mécanismes institutionnels (ce qui deviendra l’Acte Unique en 1986). Un des objectifs déclarés de l’école de Chicago est d’abolir le corpus législatif apporté par les politiques keynésiennes après le Krach boursier de 1929 en matière de régulation financière et d’activité bancaire [1], mais également de mettre fin aux interventions de l’état (ou de les modifier dans un sens favorable au marché) dans la sphère économique [2] ;

- Ce courant néolibéral anglo-saxon va trouver des alliés au sein des institutions européennes, influencés par les économistes ordo-libéraux [3] qui alimentent depuis des décennies les orientations de politique économique de la CDU en Allemagne. Ces derniers sont, entre autres, à l’origine de la politique d’autonomie et anti-inflationniste de la Banque centrale d’Allemagne, qui servira de modèle à la Banque centrale européenne (BCE).

- L’autonomisation des Etats pétroliers vis-à-vis des anciennes puissances coloniales, notamment à travers une politique de nationalisation des ressources pétrolières, et la coordination de leur politique des prix pétroliers par le biais de l’OPEP ont conduit aux deux crises pétrolières des années ’70. Les coûts de productions, particulièrement dans les industries des pays les plus avancés (USA, UE, Japon), ont considérablement augmenté et le chômage conjoncturel est parti à la hausse particulièrement en Europe.

- L’épouvantail soviétique se fissure de plus en plus, à la fois sous les coups de butoir de la corruption de la bureaucratie et l’énormité du poids sur le budget de la course aux armements. La chute du mur de Berlin en 1989 et la dissolution de l’URSS en 1991 en sont les étapes ultimes. Par contrecoups, la social-démocratie occidentale, se retrouve fragilisée à la fois dans ses références idéologiques et dans son rapport de force avec les puissances financières et industrielles.

Notes

[1e.a. la séparation entre activités de crédits/dépôts et activités spéculative en bourse.

[2L’Etat intervenant directement à travers les nationalisations de secteurs d’industries, les services publics et les régies, des travaux de grandes infrastructures, mais aussi indirectement par la socialisation d’une partie de la richesse dans des systèmes de sécurité sociale

[3L’ordolibéralisme un courant du libéralisme, apparu en Allemagne dès les années 1930 face à la profonde crise économique et politique donnant naissance au système d’économie sociale de marché. Élaboré par des économistes et des juristes conservateurs de l’Allemagne fédérale, s’exprimant dans la revue ORDO, ils ont influencé la politique économique des divers chanceliers allemands, ce qui les a auréolés de la paternité intellectuelle du « miracle économique ouest-allemand ». (http://fr.wikipedia.org/wiki/Ordolib%C3%A9ralisme)