La Ministre du travial Myriam El Khomri a présenté le 5 novembre 2015 un dossier concernant les orientations du gouvernement pour la réforme du Code du travail à Matignon.
Pas de surprise : les orientations proposées s’inscrivent dans le fil des récents rapports sollicités pour la circonstance (en particulier les rapports Badinter, Lyon-Caen et Combrexelle - disponible sur : http://www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/154000638-la-negociation-collective-le-travail-et-l-emploi). Voir aussi pour une synthèse critique : http://www.mediapart.fr/journal/economie/041115/manuel-valls-lance-la-revolution-en-trois-temps-du-code-du-travail
La « révolution du code du travail » (dixit Valls) ainsi prônée relève nettement du paradigme de la flexisécurité, c’est à dire de la mise en concurrence des législations sociales au mépris de l’égalité de traitement, et de la supériorité des libertés économiques sur les libertés collectives et les droits sociaux appelés à s’y soumettre. Au fond, on ne sort pas - au contraire, on s’y enfonce - de la logique aujourd’hui dominante à l’échelle européenne - et portée par les institutions de la zone euro - selon laquelle la crise économique serait non pas due à la dérèglementation financière mais à un droit du travail trop rigide, trop protecteur des salarié-e-s, obstacle à la réalisation du droit au travail. Formidable tour de passe-passe qui porte la conclusion logique qu’il faudrait donc casser les protections du travail pour favoriser l’emploi (ce qui permet au passage d’exacerber la concurrence des uns contre les autres : les travailleurs en emploi contre les travailleurs au chômage, les salariés contre les fonctionnaires, les précaires contre les titulaires d’un CDI, les migrants contre les « nationaux », etc.).
Peu importe que cette logique ne cesse, depuis trente ans qu’elle se déploie, de casser aussi bien le travail que l’emploi et les solidarités nationales, européennes et internationales : il suffit de répéter ad nauseam, sur toutes les chaînes d’informations et à toute occasion, qu’elle est la seule voie responsable, la voie de la modernité. Les rapports d’expertise et des groupes d’experts trouvent là aussi leur raison d’être : faire prévaloir l’idée qu’il ne s’agit, au fond, que d’un débat technique, de spécialistes, mais surtout pas d’un débat éminemment politique, national et international.
Pour dénoncer cette logique mortifère et faire prévaloir d’autres possibles, la Fondation Copernic et des syndicalistes du ministère du travail ont lancé récemment un appel « Pour un droit du travail protecteur des salarié-e-s », invitant à une vaste campagne unitaire. D’ores et déjà signé par deux cents sociologues, économistes, juristes, féministes, philosophes, il est en cours de signature par des syndicalistes, des organisations syndicales mais aussi par des responsables de partis politiques et disponible sur : http://www.humanite.fr/pour-un-droit-du-travail-protecteur-des-salarie-e-s-non-au-rapport-combrexelle-588161
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